Confinement.50



Mardi 5 mai.

Confinement, jour 50.


« Même la nuit la plus sombre prendra fin et le soleil se lèvera. »

(Victor Hugo, Les Misérables)




Il paraît que la seule chose qui est vraie dans les journaux, c’est la date. Et encore...

Depuis un certain temps, je dois quand-même réfléchir un peu pour savoir si on est lundi ou mercredi ou dimanche, je dois vérifier sur le calendrier le numéro du jour qui va avec, je n’ai pas encore tout à fait intégré qu’on était passé du mois d'avril au mois de mai, et parfois je ne sais même plus très bien si on est encore le matin ou déjà l’après-midi. D’ailleurs, est-ce que ça a encore beaucoup d’importance… ? Les jours se suivent et se ressemblent comme des frères siamois, et pour les heures c’est plus ou moins la même chose. Pour savoir l’heure qu’il est j’essaie de me repérer à mes besoins primaires comme « j’ai déjà mangé » ou « je n’ai pas encore mangé », et parfois ça donne un étrange « il me semble que j’ai déjà mangé mais c’était quand la dernière fois et j’ai mangé quoi ? ». Un peu confusionnant tout ça. Les jours et les heures ne sont plus les repaires temporels qu’ils étaient, avant, tour à tour rassurants ou stressants, et qui rythmaient ma petite vie pépère. Tout juste aujourd'hui si ils me donnent encore une vague idée du temps qui passe. Pour le temps qu’il fait, il suffit de regarder par la fenêtre et aujourd’hui la fenêtre dit bof, à peu près aussi bof que mon moral, parti aux fraises en attendant le retour du soleil…

En faisant un peu de rangement dans ma salle de bains hier, je me suis rendue compte que ma montre était sagement restée là où je l’avais abandonnée il y a 50 jours, et qu'elle indiquait toujours l’heure d’hiver. C’est vous dire si cet objet, autrefois tout aussi essentiel qu’indispensable, est passé désormais au rang de babiole de seconde zone devenue parfaitement inutile, au même titre que mon eyeliner et mon soutien-gorge. Ah, vous aussi ? 😁 Et soudain, en remettant ma montre à l’heure d’été (pour quoi faire, je vous le demande) une évidence m’est tombée dessus comme la pomme est tombée sur la tête de Newton (même si c'est pas vraiment vrai) : Damned, j’ai manqué le printemps ! Ma saison préférée, celle que j’attends de pied ferme aussitôt qu’on passe à l’heure d’hiver le dernier dimanche d'octobre, ma saison la plus favorite entre toutes me serait passée sous le nez, comme ça, sans prévenir et sans rien dire, comme si j’avais dormi 50 jours d’affilée, sans voir pousser la moindre petite jonquille, ni apercevoir le plus petit riquiqui de brin de muguet ? Ben merde alors…

Et « en même temps », comme dirait l’autre... Hormis le fait d'avoir loupé les plus beaux jours de l’année cette année, qu’est-ce qui est vraiment différent de ma vie d’avant ? Je veux dire, excepté le fait que je sois assignée à résidence H24 en pyjama de jour – ou pyjama de nuit, en fonction du moment de la journée – et que je sois obligée – summum de l’absurdité – de me signer un mot d’excuse à moi-même pour m’autoriser à sortir de ma niche pendant une heure dans un rayon d'un kilomètre ? A part que chacune de ces journées, redoutablement identiques, coule et s'écoule au pas léthargique d’un cortège funéraire d’escargots asthmatiques sous oxygène, entre l’heure de « j’ouvre les yeux » et l’heure de « je vais me coucher » ? Pas grand-chose, assurément…

Sauf peut-être les moments des repas, qui se sont insidieusement éparpillés vers des créneaux horaires hors cadre et tout à fait inédits. J’ai bien envie de vous dire que c’est de la faute de ma montre là, qui est restée bloquée sur l’heure d’hiver, mais bon... C’est vrai aussi qu’au fil des jours, c’est devenu un peu (beaucoup… passionnément… à la folie...) du grand n’importe quoi, au gré de la fantaisie des jours qui passent : petits déjeuners entre 6h30 et 11h, déjeuners entre midi moins le quart et 15h30, dîners du début de l’apéro à la fin du dessert… Non vraiment, ça ne peut plus durer, il faut que ça cesse ! D’ailleurs, ce décalage horaire hors de contrôle a fini par provoquer des dommages collatéraux tellement rédhibitoires que depuis ce matin, j'ai le regret de devoir vous l'annoncer, ma balance et moi, on est en instance de divorce. On ne sait pas encore qui va garder les kilos, mais j’ai bon espoir et je pense que je vais finir par avoir gain de cause (et donc gain de kilos) (oui, bon, ben ça va, vous êtes dispensés de commentaires) (je vous demande si votre grand-mère fait du vélo sur un tonneau en maillot de bain moi, non, bon, alors poupouille et bonne soirée, en vous remerciant)...

A part la rupture définitive avec ma balance, rien donc (en tout cas pas grand-chose) n’a vraiment changé. Mais en ces temps politiquement corrects, où il n’est plus possible d’appeler un chat « un chat » (n’en déplaise à la Poilue) sans qu’on soit immédiatement taxé de malveillance vis-à-vis de la cause animale, je vais quand-même vous faire une toute petite confidence entre quat'zieux : je crois que je commence à bien m’habituer au confinement, moi. Je trouve même que c’est plutôt cool en fait, et...

NON, J’DÉCONNE ! SORTEZ-MOI DE LÀ, JANPÖPLÜ-Ü-Ü !!!

(oui, quand je suis énervée je parle suédois en bégayant, parfois)

Allez, courage à tous… c’est bientôt fini… je crois. 😉
Prenez soin de vous, et si vous le pouvez : RESTEZ CHEZ VOUS ! 💕
Je vous embrasse et je vous aime. 😘

Emcy

Commentaires

  1. Courage! Pour l avoir vécu hier, un reprise partielle du travail ressemble beaucoup à une arrivée sur Mars.

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  2. Libérés, délivrés !!! Le jour du déconfinement est arrivé !!! Libéréeeeeeeeees, délivréeeeees.... Maintenant il va falloir sortir ma p'tite dame 😉😉😉

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